Notre Évêque Hervé Giraud est devenu une personnalité marquante de notre département. La presse locale cherche à en savoir un peu plus sur l'homme de Dieu, d'autant plus qu'il utilise les nouvelles technologies pour s’exprimer, en plus de l'écriture. La semaine dernière, dans une grande librairie de St Quentin, il dédicaçait son dernier livre.
Ci-dessous, l'article du journal La Croix :
(http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/Le-dimanche-de-Mgr-Herve-Giraud-2014-02-07-1102969) :
« Mon père était cuisinier. Il
travaillait donc tous les dimanches dans son restaurant, à Voiron. Et moi, dès
l’âge de 8 ans, je faisais le service en salle ou au bar. Je dressais les
couverts sur les tables, ou bien je préparais les plats, par exemple en décortiquant
les grenouilles sous l’eau froide. J’en conserve un souvenir mitigé.
Si mon enfance n’a pas été malheureuse, elle fut rude. Ces dimanches, on
travaillait jusqu’à 16 heures pour laver la vaisselle à la main. Mais je
recevais des pourboires et les clients étaient souvent généreux. Ainsi, à mon
entrée en sixième, j’ai pu m’offrir un vélo à huit vitesses et en profiter un
peu le dimanche… après 16 heures !
C’est peut-être en raison de ce passé qu’aujourd’hui encore, je travaille
tout le temps. Il m’est très difficile de m’arrêter, même une heure. Apprendre
à me reposer, c’est pour moi un vrai travail, même le dimanche. Aujourd’hui
comme hier je n’arrête pas, selon l’expression de ma grand-mère, de “broger”,
de penser, de réfléchir.
Mon père n’était pas croyant, mais ma mère nous envoyait à la messe le
samedi soir, ou tôt le dimanche matin. Ma grand-mère, Mémé Alice, était très
croyante. Comme elle était agricultrice, je passais aussi mes vacances à
travailler, y compris le dimanche, pour “ébourrer” les oignons. Pourtant, j’ai
toujours été un pratiquant régulier, notamment à la première messe du matin. C’est
là que j’ai appris à goûter l’Évangile. Avec mes frères, on ne ratait pas la
messe. Mais il fallait se lever tôt ! Quand j’étais adolescent, le dimanche, je
pratiquais aussi le basket, surtout pour retrouver les copains.
Avant même de connaître un prêtre, j’ai toujours su, même si je luttais
très fort contre cette idée, qu’un jour je serais prêtre. À 17 ans,
lorsque j’ai eu mon bac, j’ai souhaité entrer au séminaire, mais mes parents m’ont
sagement demandé de poursuivre mes études. En math sup puis en math spé, à
Lyon, je participais à l’animation de l’aumônerie des collèges publics.
Puis, au séminaire Saint-Irénée, toujours à Lyon, mes dimanches étaient
pris par mon engagement apostolique à Tournon et à Vals-les-Bains (Ardèche).
Tout comme à Rome, lorsque j’étudiais à l’Université grégorienne. Là, lorsque
je n’étais pas “de service” pour prêcher à Saint-Louis-des-Français, j’ai enfin
pu connaître de “vrais” dimanches, pour visiter Rome et l’Italie.
Lorsque j’ai débuté mon ministère en paroisse, à Privas (Ardèche), je
célébrais cinq messes dominicales. Et le lundi, jour habituel de repos des
prêtres, je préparais mes cours de théologie morale, une matière difficile et
sensible, pour la Catho de Lyon. De 1992 à 2003, en fonction au séminaire
Saint-Irénée puis universitaire à Lyon, j’étais plutôt libre le dimanche. Cela
m’a causé un tel sentiment que j’ai demandé à être rattaché à une équipe
pastorale à Tournon : célébrer la messe avec les gens me manquait.
En 2003, nommé évêque auxiliaire de Lyon, je passais toute ma semaine à des
tâches de gestion des personnes et d’administration. Alors, le dimanche, les
messes de confirmation étaient
ma grande respiration en paroisse. Enfin sorti de mon bureau et des multiples
réunions, j’aimais beaucoup y prêcher, avec le Peuple de Dieu dans sa grande
diversité.
Depuis le 22 février 2008, je suis évêque de Soissons, Laon et
Saint-Quentin. Évêque diocésain ordinaire, j’en suis à ma quarantième visite
pastorale. Ce sont de vrais bonheurs ! Il me reste encore trois visites pour
boucler le tour des 864 clochers de l’Aisne.
Donner l’homélie, c’est, pour moi, tous les dimanches, une vraie joie. J’y
vois un service, dans un double sens : je sers l’Évangile à d’autres, comme je
servais un bon plat dans le restaurant de mon père ; et je suis au service de
la Parole qu’est Jésus lui-même. C’est mon premier devoir. Les gens
écoutent et attendent la Parole et une parole. J’ai envie de leur dire : “àvous
la Parole ! Servez aussi la Parole.” Ma manière d’être et de penser fait que
j’aime développer une pensée simple, structurée et compréhensible par tous.
Désormais, les dimanches après-midi, je prépare aussi mes “twitthomélies”
de la semaine. Cela prend un peu de temps, mais j’aime ce moment-là. Plus de
mille de ces homélies en 140 caractères sont rassemblées dans un
livre (1). Je continue donc à travailler même le dimanche ! Reste que le
dimanche soir, je m’accorde parfois le temps de regarder un film. Depuis deux
ans, je suis amené à participer au Festival de Cannes, et cet autre lieu de
service de l’Évangile me passionne aussi. »
Recueilli par FRÉDÉRIC MOUNIER